Le syndrome de l'imposteur au travail
Le syndrome de l'imposteur

Hélène VIEVARD, psychologue du réseau Pros-Consulte, nous explique ce qu’est le syndrome de l’imposteur et nous conseille pour réussir à le combattre.

Qui n’a pas déjà douté de ses propres compétences ? Ressenti la peur de ne pas être à la hauteur ? Le sentiment de ne pas être digne de la confiance reçue ? Et n’a pas laissé passer trop de belles opportunités ?

Ce sentiment d’illégitimité qui invite à la remise en cause permanente, c’est ce que l’on appelle, le syndrome de l’imposteur. Il touche beaucoup d’entre nous et peut se révéler particulièrement handicapant.

  • Qu’est-ce que le syndrome de l’imposteur et comment se manifeste-t-il ?

Le syndrome de l’imposteur ou plus exactement, l’expérience de l’imposteur (il s’agit d’un mécanisme psychologique plutôt que d’une maladie) a été identifié par deux psychologues Pauline Rose Clance et Suzanne Imes en 1978.

Le syndrome de l’imposteur c’est la conviction de ne pas mériter sa place et de tromper l’autre. C’est l’appétence à nier ses accomplissements individuels en internalisant ses échecs et en attribuant ses victoires à des facteurs externes (hasard, relations, …). Ceci nourrissant la peur d’être démasqué.

Bien qu’il reste encore peu connu du grand public, environ 70% des individus rencontrent le syndrome de l’imposteur à un moment de leur vie, plus particulièrement lors des périodes de transitions.

Le mécanisme provoque des sentiments divers. Il peut concerner les domaines professionnels mais aussi le domaine familial, le cercle des loisirs, l’apparence physique.

La plupart du temps, ces personnes réussissent parfaitement dans la vie, mais ne s’en attribuent pas le mérite. Cette modestie poussée à l’extrême, les pousse souvent à l’auto sabotage et à la surcompensation.

  • Existe-il des causes à ce syndrome ?

Le syndrome est avant tout lié à une mauvaise estime de soi et un grand besoin de reconnaissance.

Il prendrait sa source sur les plans psychologiques et sociaux.

Du point de vue psychologique, l’expérience de l’imposteur viendrait de la petite enfance, au sein de la cellule familiale ou à l’école puis à l’adolescence. Lorsque que l’on met l’enfant sous pression dès son plus jeune âge, lui intimant de réussir qui qu’il soit et peu importe ses affects propres.

Un « devoir de légitimité » est ainsi ressenti, notamment pour l’adolescent qui va idolâtrer une personne (dans sa sphère familiale ou ailleurs) et chercher à lui ressembler à la perfection sans percevoir que c’est souvent inatteignable.

La cause sociale émergerait des normes et des valeurs individualistes de notre société qui nous pousseraient à la compétition et à la soumission à des diktats absolus : celui de réussir intellectuellement, financièrement, dans sa vie personnelle, d’être le meilleur, pour être reconnu, pour exister, pour avoir de la valeur.

Certains profils seraient ainsi plus fortement conduits à ressentir ce syndrome :

  • ♦ Les perfectionnistes et les experts, dont les attentes à tous les niveaux sont particulièrement élevées,
  • ♦ Les « génies naturels » et les autodidactes qui ont l’impression de ne pas mériter leur place,
  • ♦ Les solistes /solitaires, indépendants, auto-entrepreneurs pour qui il est difficile de demander de l’aide et qui ne reçoivent que peu de feed-back leur permettant de s’évaluer à leur juste valeur,
  • ♦ Les ainés de famille dépositaires d’un « mandat intergénérationnel » les poussant à devoir réussir,
  • ♦ Les minorités qui seraient davantage touchées par un processus de disqualification.

Les femmes ne seraient pas plus touchées que les hommes mais ressentiraient de manière décuplée le syndrome en raison des stéréotypes sociaux.

 

  • Comment réussir à le combattre ? Avez-vous des conseils à mettre en pratique au quotidien ?

La plupart du temps, l’expérience d’imposture se résout par elle-même en apprenant à prendre du recul et à rester centré sur soi.

En en parlant à son entourage, on peut également apprendre à être moins exigeant vis-à-vis de soi-même et à s’apprécier à sa juste valeur.

Si cela n’est pas suffisant, un travail de psychothérapie peut aider à identifier d’où vient son sentiment pour pouvoir s’en détacher et retrouver l’estime de soi. 

Le travail consistera à se reconnecter à la personne que l’on est réellement dans un mouvement d’acceptation de soi, sans comparaison avec les autres ni recherche de perfection.

Le travail portera sur l’apprivoisement de ses peurs et la recherche de ses croyances limitantes pour faire taire le sentiment d’infériorité et cesser de s’identifier aux étiquettes que l’on s’attribue.

Et aussi à retracer ses victoires et accomplissements pour faire émerger la réalité de ses compétences et de ses talents pour développer, ainsi, l’affirmation de soi.

Il s’agit d’apprendre à s’accepter tel que l’on est, même imparfait et d’identifier ses failles pour tirer profit de ses échecs et ne pas les reproduire.